samedi 16 juillet 2022

David Heska Wanbli Weiden – Justice Indienne – Totem Poche - 2022

 

L'histoire

Réserve Indienne lakota de Rosebud, Dakota du Sud (USA).Virgil Wounded Horse est un justicier qui pallie aux manques de la police tribal (dont les moyens et les effectifs sont des plus absents). Sa méthode : contre quelques dollars, il va faire sauter quelques dents où un bras à des des violeurs de mineur(e)s, des types alcoolisés qui tabassent leur femme.Mais un jour, on lui confie une mission très différente : démanteler un réseau d'héroïne qui arrive dans la réserve... Va-t-il réussir ce défi, qui implique un membre de sa famille, et aussi ébranler ses convictions ?


Mon avis

Dans le genre polar amérindien, les amateurs connaissent Tony et Anne Hillerman qui sont des porte-paroles de la nation navajo.Voici David Weiden qui lui, pour être un lakota (une tribu sioux), nous entraîne dans son univers.

Il met surtout l'accent sur les difficultés de vie dans cette réserve indienne, où les gens sont pauvres, nourris par la mal-bouffe et s'abreuvant de bières de basse qualité. Les plus démunis vivent dans des mobile-home, mal chauffés l'hiver où il gèle, vivant de maigres allocations et n'ayant pas beaucoup d'espoir de trouver un emploi digne de ce nom.

Et puis il y a les origines. Métissé (fils d'un lakota et d'une osage, il n'est pas très bien considéré dans sa communauté car il n'est pas un pur lakota. D'ailleurs, les coutumes ancestrales ne l'intéressent pas, contrairement à Mary, sa petite amie, promise à un avenir de médecin grâce à la richesse de sa famille indienne, mais dont le père siège au conseil tribal.

Un livre qui est une tribune politique contre la politique des blancs à l'égard des lakotas ou des autres tribus indiennes issues des sioux. Parqués dans des réserves de allant du Dakota à Montana (la région des grandes plaines), ils ont certes droit à un Conseil Tribal qui a peu de moyens financiers, mais la pauvreté, l'absence de perspective et le sentiment d'injustice historique les laisse au banc de la société blanche ou riche.

C'est aussi un livre qui nous contente les traditions lakotas, dans un univers magique, à la philosophie simple d'entraide, de cérémonies de guérison (l'auteur précise bien que les coutumes décrites dans le livre sont partielles, les lakotas ne dévoilent pas aux non-initiés la totalité de leurs rites), jusqu'à la cuisine qui se rapproche de celle des anciens, plus saine et diététique. Il semble d'ailleurs que le retour aux traditions soit la seule parade qu'on trouvé les lakotas face au mépris des « wasicus », les blancs qui sont détestes et redoutés.

C'est aussi une quête interne, celle de Virgil, ancien alcoolique, homme costaud et violent qui ne trouve pas sa place au sein de la réserve, et son chemin pour faire cohabiter la justice, la modernité et la tradition salvatrice.

Quand au style de l'auteur, il peut faire penser à un Raymond Chandler du 21ème siècle, entre humour, réflexion sur la vie, le pouvoir et les origines. Un livre que j'ai adoré, étant donné ma passion pour les Amérindiens et que je vous conseille pour un extraordinaire voyage dans ces grandes plaines mythiques de l'ouest américain, loin des clichés western Hollywood.


Biographie :

David Heska Wanbli Weiden est un membre de la Nation Lakota Sicangu. Il est diplômé de l’Institute of American Indian Arts, et a reçu un doctorat de l’Université du Texas à Austin. Justice indienne est son premier roman.

Les critiques sont excellentes.



Extraits :

  • Le lendemain matin, je partis tôt pour mon rendez-vous à Rapid City. Les Indiens l'appellent Racist City, à cause des innombrables histoires de gens qui s'y font harceler par des habitants ou la police du seul fait qu'ils sont indigènes. À peine quelques années plutôt, un groupe de collégiens de Pine Ridge venu assister à un match de hockey en récompense de leurs bons résultats scolaires s'était fait arroser de bière et d'insultes par une bande de quinze hommes blancs installés dans une loge au-dessus d'eux. Les enfants avaient quitté le stade profondément humiliés. Les coupables avaient été identifiés et un seul avait été mis en accusation, seulement un, pour trouble à l'ordre public. À la surprise de personne, le jury acquitta le prévenu et les enfants apprirent une amère leçon sur la manière dont la justice fonctionne dans cette bonne vieille Amérique. Et les gens se demandent pourquoi les Amérindiens veulent rester dans leurs réserves.

  • En regardant la pierre tombale de ma mère, je me souvins de ce qu'elle m'avait dit juste avant de mourir.
    - Akita mani yo.
    "Observe tout en marchant." Je crois qu'elle voulait dire qu'il fallait que j'aie conscience du monde tel qu'il était vraiment, pas tel que je voulais qu'il soit. La conscience indienne.

  • Le ciel immense s'ouvrait devant moi tandis que je parcourais les prairies vallonnées et les étroits canyons ; la beauté de notre terre me remplit de joie.

  • Je me demandai comment ce serait, de vivre sans ce poids sur ses épaules, sans le poids des ancêtres assassinés, de la terre volée, des enfants maltraités, le fardeau qui pesait sur tous les Amérindiens.

  • Les Indiens ont toujours su qu'il fallait guérir l'esprit en même temps que le corps. Je veux utiliser les cérémonies, les herbes et les prières combinées aux remèdes allopathique pour aider les gens à marcher dans la beauté.

  • 'avais découvert que la tristesse était comme une vieille voiture abandonnée pour de bon dans un champ - elle change un peu avec le temps, mais elle ne disparaît jamais. On peut l'oublier pendant un moment, mais elle est toujours là, de plus en plus mangée par la rouille, jusqu'à ce qu'on la remarque à nouveau.

  • La lampe vacilla, créant d'étranges ombres sur le portrait de Chief Red Cloud, le seul chef de la tribu qui avait vaincu l'armée américaine sur le terrain qu'ils avaient volé quelques années auparavant. Red Cloud, qui était mort seul, oublié de tous dans son grand âge, à quelques kilomètres d'ici.

  • l n'y a pas de mot pour dire adieu en lakota. Voilà ce que ma mère me répétait. Bien sûr, il existe des mots comme tous, "plus tard", que les gens utilisent comme substitut moderne. Elle m'avait dit que les lakotas n'avaient pas de terme pour l'adieu parce que nous étions connectés pour toujours. Dire adieu signifierait que le cercle était brisé.

  • Beaucoup de gens qui ne sont jamais allés dans une réserve supposent que la population y est exclusivement composée d'indiens. En réalité, un grand nombre de Wasicu s'étaient vu donner un lopin de terre des réserves à la fin du XIX° siècle, quand le gouvernement fédéral avait promulgué une loi pour lotir la plupart des réserves en parcelles de soixante-cinq hectares; ils avaient attribué la majorité des concessions statutaires à des Indiens mais en avaient donné un nombre considérable à - qu'elle surprise - des fermiers et ranchers blancs. Au temps pour leur promesse : " Cette terre vous appartiendra tant que l'herbe poussera."

  • - Des navets ? Depuis quand tu cueilles des navets ?
    - Eh bien, Lack m'a dit que le tinpsila est l'aliment indigène le plus important dans les Plaines. On peut le manger cru, le rôtir comme une pomme de terre, et même le râper comme une farine et fabriquer du pain indien.


En savoir plus :


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.