vendredi 7 avril 2023

NICOLAS DRUART – Cinabre – Harper Collins Éditions - 2022

 

L'histoire

Le dernier roman de Nicolas Druart dont j'avais bien aimé « Jeu de dames » se passe encore à Toulouse. Il est même concentré sur le centre ville, entre le Capitole et les allées Jean-Jaurès (rebaptisées et modernisées en ramblas).

Elliot, un infirmier timide travaille pour un cabinet associés libéral et effectue chaque jour ses tournées, dans une vie monotone. Sa seule amie est une ancienne fiancée qui relit les livres qu'il écrit, des polars sanguinolents. Mais un jour il s'inquiète de ne pas avoir des nouvelles de son collègue Manu connu pour des absences répétées, mais là, personne n'a de nouvelles. Il a été vu pour la dernière fois en sortant du très chic Hôtel Ferdinand, où il soignait une employée récemment opérée.

Pendant ce temps, la police emmenée par le capitaine Aubert est dans l'impasse d'un triple meurtre au sabre sur la place occitane (en Centre ville, au dessus d'un centre commercial) à quelques 50 mètres des allées Jean Jaurès. Puis c'est un massacre dans le métro du Capitole, 13 victimes, de nombreux blessés amputés. Il semble que les crimes soient commis par des individus différents (la scientifique est formelle) mais habillés d'une vaste cape noire à capuche. L'enquête se complique quand en remontant dans le temps beaucoup de cas d'amputations (mains, avant-bras, pieds) ont été soignés dans les 2 grand CHU de la ville, sans que personne ne porte plainte ou que la police n'en soit informée. Quelles sont les motivations des assassins ? Qui sont-ils ? Une enquête complexe va alors nous tenir en haleine sur près de 500 pages.


Mon avis

Amateurs de suspense, vous serez comblé par ce polar très facile à lire et addictif, très bien structuré. On suit à la fois l'évolution de l'infirmier Elliot et l'enquête de police. Mais aussi la vie dans cet hôtel Ferdinand réputé très chic. Ne le cherchez pas sur une carte il n'existe pas (contrairement à l’hôtel Pullman, en brique rouge foncée). Cet hôtel a une étrange histoire. Son fondateur massacra toute sa famille dans les années 80. Fermé pendant une dizaine d'années, c’est Richard Ferdinand, le petit dernier et seul rescapé de la famille qui décidera de sa rénovation, à l'identique, et de son ouverture. Le restaurant gastronomique est un des plus renommé de la ville, mais encore faut-il y avoir les moyens financiers de s'offrir un repas et encore plus d'y passer une nuit. Mais certaines rumeurs disent que l'hôtel serait hanté et qu'on en sort fou, sûrement en raison du passé.

Elliot, sans nouvelles de son collègue Manu est appelé par le réceptionniste de l'hôtel pour continuer les soins de l'employée malade. Assez angoissé de nature et mis en garde par sa seule amie et confidente, il se rend à ce rendez-vous très inquiet et découvre un lieu luxueux certes, décoré style « art déco », le tout sur fond de rouge profond, le rouge cinabre (interdit parce qu'il contenait des particules de sulfate de mercure, mais aussi porteur d'une symbologie) et remplacé par un vermillon intense bien moins nocif. Murs, tapis, fauteuils, tout est décoré dans les tons de rouge. Peu rassuré, le jeune infirmier découvre sa patiente : une sublime jeune femme qui vient de subir une opération et à laquelle il doit changer le pansement. Il en tombe follement amoureux, mais sa timidité l'emporte. Car Elliot est un personnage totalement introverti, qui vit seul, se nourrit de pizzas ou de burgers, n'a pas d'amis à par son ex Alice, et est un peu isolé dans le cabinet d'infirmiers dont il est pourtant un membre fondateur. Il est amené à revenir pendant 15 jours à l'hôtel qui se comporte de deux parties. L'aile est, dont le dernier étage est réservé aux employés et l'aile nord qui n'héberge que des clients de luxe (des stars de passage ou des personnalités politiques) ou des clients à l'année, et cela sur invitation personnelle du directeur. Petit à petit il noue des relations amicales avec sa magnifique patiente, et un jour à sa grande surprise, il reçoit une invitation personnelle de Richard Ferdinand à venir passer une nuit dans l'aile Nord, ce qui l'inquiète mais l'excite en même temps. Ne s'intéressant pas à l'actualité, il ignore les massacres de la place Occitane et du métro. Alors que la police piétine, malgré les renforts envoyés, la médiatisation de l'affaire, Elliot va découvrir le luxe hédoniste de l'aile nord.

Finalement le personnage central du livre est bien cet hôtel. Si vous ne connaissez pas le haut des allées Jean-Jaurès, il y a en effet 2 blocs d'immeubles que personnellement je n'ai jamais aimé, en raison de leurs hauteurs et surtout de la couleur qui n'a rien à voir avec la briquette rose, mais d'un rouge soutenu, très encastrés avec des colonnades du même rouge qui rapetissent le pourtant large trottoir et y projettent une ombre inquiétante.

Bref si vous êtes amateurs du genre suspense psychologique et d'hémoglobine ce polar est pour vous. En ayant déjà lu un autre, je trouve quand même des similitudes dans la marque de fabrique, même découpage police/autres, problèmes psychiatriques. Même si ici est véhiculée une idée d'une société qui pourrait devenir totalitariste (je ne spoile pas), elle n'est pas assez étaillée pour en faire ce qui aurait pu en faire un livre fort. Mais je ne pense pas que ce soit le but de l'auteur qui se contente d'intrigues bien fichues et originales, en délaissant un peu le fond. Bref cela se lit, et cela s'oublie comme beaucoup de polars. En ratant peut-être ce que les auteurs/autrices des Amériques ont bien compris, le polar ne devient plus qu'un prétexte pour dénoncer une cause quelle soit sociale, raciale, féministe.

 

Extraits :

  • De nos jours, les êtres humains passent leur temps à se juger. C'est le mal du siècle. Aujourd'hui, vous êtes jugé pour tout et n'importe quoi. Il existe les jugements standards : le sexe, la couleur de peau, la religion, le style vestimentaire, l'orientation sexuelle ; mais, ces dernières années, cette liste a augmenté de façon exponentielle. Désormais vous pouvez être jugé sur votre régime alimentaire, votre empreinte carbone, l'endroit où vous faites vos courses, si vous commandez sur Internet. Et, comble de la bêtise, vous pouvez même attribuer des notes. Nous sommes dans une culture de jugement et de notation. On juge. On note. Vous pouvez noter le film que vous avez vu au cinéma, le dernier bouquin que vous avez lu, mais aussi le restaurant où vous avez mangé la veille, le coiffeur qui vous a coupé les cheveux, le médecin qui vous a examiné, l'hôpital qui vous a soigné. Vous pouvez même demander à vos proches de noter le service funéraire qui s'occupera de vous.

  • De nos jours, les êtres humains passent leur temps à se juger. C’est le mal du siècle. Aujourd’hui, vous êtes jugé pour tout et n’importe quoi. Il existe les jugements standards : le sexe, la couleur de peau, la religion, le style vestimentaire, l’orientation sexuelle ; mais, ces dernières années, cette liste a augmenté de façon exponentielle. Désormais vous pouvez être jugé sur votre régime alimentaire, votre empreinte carbone, l’endroit où vous faites vos courses, si vous commandez sur Internet. Et, comble de la bêtise, vous pouvez même attribuer des notes. Nous sommes dans une culture de jugement et de notation. On juge. On note. Vous pouvez noter le film que vous avez vu au cinéma, le dernier bouquin que vous avez lu, mais aussi le restaurant où vous avez mangé la veille, le coiffeur qui vous a coupé les cheveux, le médecin qui vous a examiné, l’hôpital qui vous a soigné. Vous pouvez même demander à vos proches de noter le service funéraire qui s’occupera de vous.

  • Pour moi, la lecture, c’est faire une pause dans le temps. Un moyen de s'émanciper de cette époque régie par les lois du numérique. Pour lire, vous n'avez pas besoin de créer un compte, d'entrer un identifiant, de vous connecter à je ne sais quelle base de données qui vous bombardera plus tard de messages publicitaires. Lire, c'est faire un gigantesque doigt d'honneur au progrès.

  • Avec la fermeture massive des lits d'hôpitaux, les suppressions de postes, la hausse de l'hospitalisation en ambulatoire, les patients se retrouvaient mis à la porte sans vergogne.

  • Les notes suaves du compositeur George Gershwin emplissaient la,cave immense. Mur de brique rouge. Eclairage tamisé. Fauteuils rembourrés. Odeur de cuir mâtinée des fragrances de cigares.

  • Ses débuts au CHU il les avait passés à rêver qu'un beau jour il se tirerait. Ne plus être considéré comme un vulgaire matricule, un pion placé au bon vouloir d'une direction déshumanisée.


Biographie

https://nathbiblio.blogspot.com/2023/03/nicolas-druart-jeu-de-dames-harper.html


Sur le roman

vidéos

Presse

Pour l'univers du roman, une fois de plus je vous remercie de suivre le lien : https://nathbiblio.blogspot.com/2023/03/nicolas-druart-jeu-de-dames-harper.html

 

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