vendredi 12 août 2022

ZOYA PIRZAD – Le goût âpres des kakis – Éditions Zulma 2010 (ou livre de poche).

 


L'histoire

Un joli recueil de cinq nouvelles dans l'Iran d'hier et d’aujourd’hui. Des coupoles tiraillés entre modernité et traditions, des histoires de solitude, toute un chemin de vie merveilleusement conté par Zoyâ Pirzâd


Mon avis

Le principal sujet de ce livre est l'amour en Iran. Entre la modernité des jeunes qui ont fait des études supérieures notamment en Amérique ou en France, et ceux issus de la tradition où les femmes doivent avant tout savoir tenir leur foyer. Certains hommes libres ont une vision moderne de la femme. Certaines femmes travaillent et n’hésitent pas à divorcer, et vivre leurs désirs. Les femmes mariées sont souvent délaissées par leurs conjoints ou font la loi en exigeant des jolies choses, souvent chères comme un lave-linge, un réfrigérateur, ou des décorations exorbitantes, des bijoux ou des tenues de marques qui ruinent les maris.

Et puis il y a des âmes esseulées qui tentent de vivre leur vie avec gentillesse et honnêteté. Des jolies histoires qui parfois sont sans conclusion, nous permettant d'imaginer des suites que l'on espère heureuses.

Les mots écrit en persan font l'objet d'un glossaire et d'explications en fin de livres. On y apprend ainsi le mode de vie raffiné et délicat des perses même si les jeunes plus éduqués sont pour des décorations modernes, moins de meubles et de bibelots traditionnels. A la fois tendre et triste, ce recueil est un petit voyage en Iran, dans la vie quotidienne des perses. Sans oublier la subtile orientation féministe de l'auteure, qui, l'air de rien, ausculte la société et les désirs d'indépendance des femmes mais aussi des hommes jeunes.


Extraits :

  • Morad s'assit devant la tombe de Sadegh Hedayat.
    Au bout d'une demi-heure,Taraneh eut froid. Plusieurs fois elle eut envie de dire " on s'en va ? " mais elle se souvint de Jean qui répétait toujours à Minouche : " Ce que vous faites de pire, vous les femmes, c'est de tanner les hommes ! Si les femmes comprenaient que les hommes ont parfois besoin de solitude, le monde serait plus supportable ! "
    Elle se leva, s'éloigna de Morad pour lire les noms et les dates de naissance et de mort sur les pierres tombales. Elle parvint jusqu'à la tombe de Marcel Proust dont Morad lui avait parlé maintes fois et dont Minouche disait que si elle apprenait le français, c'était pour pouvoir lire ses oeuvres dans leur langue d'origine...

  • Cette maison était sa dote. Une maison aux vastes pièces lumineuses, protégées par des persiennes, avec son large escalier en colimaçon qui s'élançait depuis le hall d'entrée jusqu'aux chambres à coucher du premier étage. Le sous-sol était organisé autour d'une vasque au centre de laquelle se tenait un ange au regard étonné tourné vers la cour, jonchée d'un fin gravier. Celle-ci gravitait aussi autour d'un bassin entouré d'un massif d'églantines, de roses rouges et d'un plaqueminier.

  • La femme consciencieuse est comme le flambeau qui brûle sans cesse au coeur de la famille et qui fait rayonner tout autour d'elle sa pure lumière et sa bonté.

  • Tu as parfaitement raison. Ça m’est égal. Je n’ai ni le temps d’admirer tes broderies et ton tricot, ni la patience de t’amener des fleurs chaque jour, de te féliciter pour ta cuisine et tes talents de maîtresse de maison, ou encore de te réciter des poèmes d’amour. Pour moi, cela ne fait aucune différence de dormir dans des draps propres et repassés ou par terre sur un matelas sans draps !

  • Quoi ?, se marier sans ma permission ? J'aimerai bien voir ça ! Je n'ai pas élevé un fils pour qu'il nous ramène une étrangère !

  • Monsieur Naghavi ne voyait pas d'un bon œil que les femmes aillent chez le coiffeur. "Pure perte de temps et d'argent, disait-il. Sans compter les mille et une sottises que les femmes y profèrent".


Biographie

Née en 1952 à Abadan, romancière, nouvelliste, Zoyâ Pirzâd est née d’un père iranien d’origine russe par sa mère et d’une mère arménienne.
Mariée, mère de deux garçons, elle débute sa carrière d'écrivain après la révolution de 1979.
Elle a d’abord publié trois recueils de nouvelles dont "Comme tous les après-midi", en 1991. Trois recueils repris aux éditions Markaz à Téhéran en un seul volume. En 2001, elle a publié un roman, "C’est moi qui éteins les lumières", salué par de nombreux prix, dont le prix du meilleur livre de l'année. En 2004 elle publie: "On s’y fera" roman très remarqué.
Zoyâ Pirzâd est aussi traductrice d’Alice au pays des merveilles de Lewis Carol et de poèmes japonais. Elle fait partie des auteurs iraniens qui font sortir l’écriture persane de ses frontières et l’ouvrent sur le monde. Sa langue est un persan simple et quotidien, une langue très équilibrée. La leçon ultime de Zoyâ Pirzâd est humaniste.




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