L'histoire
André, vit du RSA dans une caravane déglinguée en compagnie de l'imposant Jean-Jacques, alcoolique, tout juste viré par sa riche femme pour adultère. Un troisième larron Canard, plongeur dans un établissement de luxe pour personnes déficientes mentales a une affaire à proposer. Enlever le frère jumeau d'un des plus importants hommes d'affaires du pays, sosie parfait de ce dernier pour aller en Suisse et vider les comptes du milliardaire en faisant passer le malheureux Julien pour le vrai patron. Évidemment avec une équipe de bras cassés pareils l'affaire a peu de chance d'aboutir. D'autant que l'appât du gain donne aussi l'eau à la bouche à un stupide détective privé et à quelques autres...
Mon avis
Un polar hilarant mené par une bande de pieds nickelés, losers sublimes dans l'ignorance et le ridicule. Colin Thibert n'a pas son pareil pour nous décrire ce petit monde de marginaux, dont l'intelligence n'est pas la capacité première.
André et Jean-jacques ont été des militants écologistes dans leur passé, et Canard est un demi-cinglé qui se shoote à tout ce qu'il trouve dans l'armoire à pharmacie de l'institut médical pas très regardant semble-t-il. Si l'enlèvement réussit, il ne faut pas longtemps à la police, gérée directement par le Ministre de l'Intérieur, grand ami du chef d'entreprise pour penser à un enlèvement politique. Deux cadavres plus tard,les inspecteurs de la PJ vont chopper les malfrats mais sans Julien, le frère, qu'on aurait aperçu en Suisse mais qui reste introuvable. Et pendant ce temps, en toute discrétion, un peu de bon sens et de chance, l'argent de notre milliardaire s'est tranquillement volatilisé dans des paradis fiscaux, pour une fin amorale.
Voilà un polar plein de rebondissements, très drôle dans son écriture et sa structure, de quoi vous amusez pour une lecture estivale, sans vous prendre la tête. Au passage Thibert éreinte quelques petits travers de la société où l'argent et la renommée sont les deux mamelles qui font tourner le monde des grands. On ne refuse rien à Monsieur Thibault Dastry (notez le nom qui peut vous évoquer quelques grands patrons), qui doit à tout pris cacher le secret d'avoir ce frère si handicapé, qui pourrait nuire à sa belle image. Où la capitaine de gendarmerie se fait systématiquement rabrouer ou « piquer la vedette » par ces messieurs de la Grande Police Nationale. A tous les étages de la société c'est l'appât du gain ou le petit frisson d'être un peu en marge qui est le moteur. Et tant pis si nos 3 éclopés de la vie en sont pour leurs frais. Après tout, la vie est injuste non ?
Extraits :
Si désespérée que fût sa situation, il ne se voyait pas braquer une banque, une bijouterie ou un fourgon blindé. Surtout avec le pitoyable Antoine et son copain Canard, dont on pouvait, raisonnablement, craindre le pire. - C'est pas un casse, murmura Antoine, avec un sourire aguicheur. C'est beaucoup mieux ! Pas d'armes, pas de violence... - Comme Spaggiari, quoi ? - Voilà, c'est ça, approuva Antoine qui ne savait pas trop si Spaggiari était un coureur cycliste ou un artiste de la Renaissance italienne. - Creuser des tunnels, c'est pas trop mon truc non plus, grommela Jean-Jacques qui abhorrait l'effort physique. - Des tunnels ? répéta Antoine, l'œil incertain. Pourquoi des tunnels ?
- Ooooh ! Un magnifique puzzle de mille cinq cents pièces ! - C'est Rio, non ? dit Canard en examinant l'image. Avec le pain de sucre, là. - Mais non, c'est Naples. Avec le Vésuve qui fume. - Qui ça ? - Le Vésuve. C'est un volcan. - Depuis quand y a un volcan à Naples ? - Depuis les Romains, mec, tu devrais te tenir au courant.
- Thibault Dastry a un frère jumeau ? s'étonna le lieutenant Wilmers. Depuis quand ? - Depuis toujours, lieutenant. Un jumeau... - Oh. Oui. Je vois.
Un plan audacieux prenait forme dans son esprit. Désaccoutumé de penser, il en fut le premier surpris.
- Ce mec ? On peut vraiment lui faire confiance ? - Il est de gauche. - Ça veut rien dire, ça, bordel ! - Quand même !
Il était fier de lui : à cinquante ans révolus, il était passé sans difficulté du statut d'apiculteur pacifique à celui de criminel endurci.
Quant à la bibliothèque, elle ne recelait pas d'ouvrages plus subversifs que des livres de cuisine, les œuvres de Danielle Steel et de Marc Levy.
Lorsqu'il fut amené dans une petite salle d'interrogatoire où l'attendaient un capitaine de gendarmerie à l'air plutôt avenant et un homme en civil au visage émacié qui ne devait pas rire plus d'une fois par an, Jean-Jacques fut convaincu qu'il s'était fourré dans de très sales draps.
Biographie
Né à Neufchâtel en
1951, Colin Thibert, pseudonyme de Pierre Colin-Thibert, aussi connu
comme Léon Noël, est un scénariste, romancier, auteur de pièces
radiophoniques et anciennement dessinateur de presse. Après des
études littéraires, il rmonte à Paris, en 1979, et se lance dans
le dessin de presse et l'illustration. Il travaille pour une bonne
vingtaine de magazines : informatiques, sportifs, syndicaux et pour
des ouvrages scolaires ou techniques. Il signe en 1982 une bande
dessinée, Le Goût de l'exploit (éd. Sipe).
Parallèlement
il commence à écrire des pièces pour la radio ("Les Mille et
un jours" sur France-Inter, de 1983 à 1986) et fait ses
premiers pas et ses premiers sketches à la télévision grâce à
Jean-Michel Ribes qui réalise alors l'émission "Merci
Bernard". Il rencontre Roland Topor, Gébé, Gourio…Il
abandonne progressivement le dessin de presse pour travailler de plus
en plus à la télévision… (séries de dessins animés, épisodes
de sitcom).
Il entre à la Série noire en
2001 avec Noël au balcon. Il enchaîne avec Royal Cambouis en 2002
qui obtient Prix SNCF du polar du meilleur roman
policier français, Nébuleuse.org en 2002, Barnum TV (2003) et
Cahin-Cahos (2005). Remarqué pour ses publications à la Série
noire, il est lauréat du prix polar SNCF pour Royal Cambouis, et du
prix Roland de Jouvenel décerné par l’Académie française pour
Torrentius, paru aux éditions Héloïse d’Ormesson.
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