lundi 19 septembre 2022

Gilda Piersanti – Les somnambules – Éditions Le Passage Noir ou Poche Pocket 2021

 

L'histoire

Quand la fillette de 13 ans de Gabriele, honnête docteur à Rome, est enlevée, c'est tout un passé enfoui qui ressurgit. Ils étaient 3 copains, Dario, Massimo et Gabriele qui ont fait les pires bêtises de jeunesse, mais ont surtout commis un acte horrible, pour lesquels ils n'ont jamais été poursuivis. 25 ans plus tard, le passé se rappelle à eux, et menace les belles situations qu'ils ont construits. Dario est devenu un ministre respecté, Massimo un très riche entrepreneur, et Gabriele un honorable médecin. Mais quand le danger menace de les ruiner, c'est alors du chacun pour soi, et tous les coups sont bons à jouer. Et surtout les pires.


Mon avis

Avec plaisir, nous retrouvons ici Gilda Piersanti dans un polar assez inattendu. Elle explore les domaines de la vengeance, du ressentiment, et de la haine.

Les 3 héros masculins sont presque des caricatures du pire. Dario est un homme devenu puissant, surtout grâce à sa femme Simona qui agit dans l'ombre pour régler les problèmes possibles et les obstacles à la réussite de son mari. Cet homme imbu de lui-même, qui a toujours su être le leader à coups de flatterie ou de pressions. Massimo est passablement riche, mais l'amour ne peut pas acheter le cœur, et le sien bat pour Alice, la femme de Gabriele. Enfin Gabiele, un homme rongé par le remords, qui veut avant tout sauver sa fille, et qui ne veut plus être considéré comme le sous-fifre de la bande.

A cette galerie de personnages s'ajoutent les personnages de Valentina, Francesco et sa mère. Valentina vit à Los Angeles depuis qu'un drame a endeuillé sa vie d'adolescente et dont, à part des cicatrices, elle n'a aucun souvenirs. Humaine, renfermée sur elle-même, elle est le seul personnage attachant, par son passé, par son travail acharné d'artiste et de femme érudite. Francesco, l'enfant non désiré, frère de Fabrizio mort dans un incendie, fait tout pour plaire à sa mère, une mater dolorosa qui ne se remet pas de la mort de son fils adoré et utilise le cadet comme bon lui semble, entre menaces, chantage affectif, mais sans lui donner la moindre attention.

Ici les thèmes de l'emprise, et de la vengeance sont parfaitement exploités.

Tous ces personnages qui sont aussi manipulateurs que cabossés par la vie n'auront qu'une idée : sauver ce qui peut encore l'être. Et en prime une petite visite d'un quartier de Rome insolite, un peu du vieux Rome populaire qu'affectionne tant l'autrice. Inutile de vous dire que ce livre, écrit avec une apparente légèreté, assez dialogué, va vous enchanter par son suspens, sa vivacité, et son machiavélisme. On n'en attendait pas moins de Miss Piersanti, dont le talent n'est jamais pris en défaut.


Extraits :

  • La vie qu’il menait lui imposait des pauses, s’il voulait continuer à la vivre ; son psy n’avait de cesse de le lui répéter et sa femme d’en tirer les conséquences. Lui ne les écoutait que d’une oreille distraite, les médocs étaient plus fiables pour retrouver l’équilibre, sinon le sommeil. Lutter pour ne pas en abuser, céder, résister, puis céder de nouveau : c’était le cycle d’un plaisir tortueux qui risquait de se révéler dangereux. Heureusement, Gabriele, son fidèle médecin et ami d’enfance, veillait sur lui ; lui seul le connaissait vraiment. Il n’était pas sûr de tenir encore à lui comme à l’adolescence, mais il lui était attaché, surtout depuis qu’il dosait savamment ses psychotropes.

  • Un avertissement ? Pour quoi ? Ses affaires étaient globalement en règle, quelques tensions avec le fisc, comme tout le monde, réglées par ses comptables. Des méthodes d’entrepreneur banales, le fisc ne vient pas vous intimider à l’aube en heurtant votre voiture. Avait-il dérangé quelqu’un sans s’en rendre compte ? Il n’avait jamais eu affaire à de vrais criminels ; à des escrocs oui, à des crapules aussi, mais c’étaient généralement des types solitaires, des mecs qui avaient envie de tricher vite, de gagner plus vite encore, de voler bien sûr, mais sans jamais recourir à la violence. Alors pourquoi cet avertissement ? Qui voulait l’avertir de quoi?

  • Il y avait du vrai et du juste dans cette colère envers les « dominants », ainsi que tout un peuple nommait désormais les élus ; mais il y avait aussi beaucoup d’hypocrisie, de l’envie et un besoin sourd de vengeance de la part de ceux qui détestaient toute hiérarchie. Les sentiments les meilleurs se mêlaient aux plus bas et la rage qui se déchaînait se révélait parfois plus nuisible que le mal contre lequel elle prétendait lutter.

  • Elle était de nouveau la femme coopérative et efficace, prête à saisir le gouvernail de la barque dans la tempête. Sans savoir que cette fois elle ne monterait pas à bord.

  • Elle avait trouvé un filon qu’elle explorait honnêtement depuis le début, mais elle considérait que son œuvre, la vraie, c’étaient ses portraits cachés. Il lui plaisait d’imaginer qu’on les découvrirait un jour, après sa mort, et que la postérité la jugerait sur ce qu’elle n’avait jamais montré à personne.

  • Simona se voyait toujours obligée d’intervenir pour modérer ses élans, corriger certaines initiatives ou en réduire la mesure. Il fallait donner, mais pas trop, ni tout le temps, ni à tout le monde ; en politique comme ailleurs, la gentillesse était perçue comme de la faiblesse. La machine de guerre de leur couple était parfaitement au point : il était aimé ; elle était crainte.



Biographie

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