vendredi 17 février 2023

CHRIS OFFUT – Les gens des collines – Gallmeister 2022

 

L'histoire

Mick, un inspecteur des armées profite d'une permission dans son village natal du Kentucky pour rendre visite à sa femme. Celle-ci, enceinte de 8 mois d'un autre homme, la pression de son travail le laissent dans un état déplorable. Il enchaîne bouteilles de bourbon sur insomnies dans la vieille cabane insalubre de son père.

Mais sa sœur Linda, la shérif de la ville a besoin de son aide pour élucider un meurtre. C'est alors un parcours dans les collines des contreforts des Appalaches qui va redonner un peu de sens à a vie d'un homme cabossé.


Mon avis

Ce livre n'est pas du tout un polar au sens suspens du mot. C'est une occasion pour Chris Offutt de nous parler de ce Kentucky de moyenne montagne où le temps semble s'être figé, d'un siècle. Ici tout le monde connaît tout le monde, il y a des clans qui s'allient, s'opposent, se détestent et surtout règlent les différents à coups de fusil. Pas simple pour la première femme shérif, que l'homme fort du coin (qui possède aciérie, scieries, charbon, il fait vivre la région et rêve d'en être le prochain gouverneur) déteste par pur machisme.

Les gens sont des taiseux, des éleveurs et des fermiers, nichés dans les vastes collines du coin, et qui savent disparaître dans la nature fertile. Il ne s'agit pas seulement de « nature writing », même si il y a de nombreuses références à la faune (notamment les oiseaux) et la flore (notamment les pacaniers qui donnent la noix de pécan si appréciée des américain. Les gens ne sont pas très riches. Le plus souvent, malgré l'ouverture promise d'une université, ils ne sont pas allés à l'école, n'ont jamais ouvert un livre, et se contentent des potins devant une bière. C'est encore une vision d'une Amérique rurale, sans convictions. La politique n'intéresse personne, les délits sont souvent des excès de vitesse, un peu de marijuana, des querelles entre voisins. Mais les meurtres presque jamais. Et les informations pour retrouver le coupable que tout le monde connaît (et surtout les habitants et la famille qui compte bien régler le problème à sa façon se monnaient par des services rendus. Si Mick a une bonne réputation parce que c'est un chef dans l'Armée, c'est un homme brisé. Par l'infidélité de sa femme, mais il n'est jamais là, toujours en mission dans les zones de conflit, et ce travail lui pèse. Des morts ils en voit par wagons, il n'a aucune chance d'avoir un travail de bureau près de chez lui parce que c'est un des meilleurs enquêteurs. Un roman qui alterne des pages des poésie sur la nature de ce coin perdu et le pessimisme d'un héros qui doit faire ses choix de vie.

Pas un chef d’œuvre comme d'autres titres de Gallmeister, mais qui rentre bien dans leur catalogue. Son roman « les nuits Appalaches » est bien plus fort.


Extraits :

  • Un oiseau moqueur entonna son chant.L'inadapté par excellence:il ne savait qu'imiter les autres et espérer qu'on le comprenne. Mick s'était senti comme ça toute sa vie.

  • Elle riait toujours pareil, un éclat soudain. Ça la déridait, mais après elle se durcissait d'autant plus, comme si la vulnérabilité avait un coût inscrit sur une feuille de comptage invisible.

  • Partout ailleurs, les gens vivent un peu plus longtemps chaque année. Nous, nos vies raccourcissent. Ça arrive nulle part ailleurs dans le pays. Il y a vingt ans de ça, l’espérance de vie était plus élevée ici. Les collines nous tuent à petit feu.

  • Tous les griefs de Peggy sur la vie à Morehead étaient les mêmes raisons pour lesquelles Linda aimait cette ville. Le sentiment réconfortant de voir les mêmes gens, parfois trois fois en une seule journée dans différents magasins. Il y avait un protocole pour ces rencontres. La première fois, on posait des questions sur la famille. La deuxième, on souriait et on plaisantait sur le fait d’avoir le même emploi du temps. La troisième fois on souriait et on faisait un signe de main. Cela créait une intimité rassurante. Une des raisons pour lesquelles elle avait rejoint les forces de l’ordre était de maintenir l’ordre pour tout le monde, un ordre dont Peggy ne voulait plus

  • Il voulait mesurer le temps à la croissance des arbres.

  • Les Appalachiens obéissaient à des codes anciens qui les forçaient à agir. Les affronts étaient toujours personnels. Les actes de vengeance se perpétuaient d’une génération à l’autre. Quand il était à l’école, Mick récitait tous les matins le serment d’allégeance au drapeau et le Notre Père. Tous les enfants apprenaient les mots “Comme nous pardonnons aussi à ceux qui nous ont offensés”, un message fort et généreux qui ne prévoyait pas de calendrier spécifique. Dans les collines il était plus pratique de pardonner les offenseurs après les avoir tués.

  • Ne cherche pas les champignons, regarde là où ils poussent. La nuit, ne cherche pas la piste d’un animal, va juste là où il n’y a pas d’arbres. Vois des formes et des couleurs, pas la chose elle-même.

  • Il avait lu l'histoire d'un scientifique qui parlait à l'eau, puis la congelait et examinait les cristaux. Les mots gentils prononcés avec douceur donnaient de meilleurs cristaux. L'idée paraissait tirée par les cheveux mais peut-être que c'était vrai. Les humains étaient composés d'environ soixante pour cent d'eau et ça ne pouvait pas faire de mal d'essayer. Rien ne risquait de faire plus mal que sa tête, de toute façon. Il enfonça sa tête dans l'eau et parla.

  • Mick songea à plusieurs réponses, puis décida de laisser couler. Inutile de débattre de l'espérance de vie des bêtes sauvages ou de ce que qu'entendait Tucker par "connaître un écureuil". Comment pouvait-on connaître un écureuil ? C'était à peine si on pouvait connaître un humain, même sa propre femme.

  • Rien chez Tanner ne trahissait un tueur, ce qui signifiait qu’il pouvait être sociopathe ou innocent. Ou les deux. Ses yeux brillaient d’une intelligence enfouie, un trait que partageait Mick. Les gens des collines apprenaient tôt à ne pas montrer à quel point ils étaient futés. 

     

Biographie

Né en 1958 à Lexington dans le Kentucky, Chris Offutt est un écrivain américain de roman policier. Fils de l'écrivain Andrew J. Offutt (1934-2013), il suit les cours de l'Université d'État de Morehead. Diplômé, il entreprend un voyage à travers les États-Unis et exerce différents métiers pour vivre.
Il publie, en 1992, un premier recueil de neuf nouvelles, intitulé "Kentucky Straight", qui dépeint le quotidien rural du Kentucky. Il commet par la suite deux romans semi-autobiographiques: "Le Fleuve et l'Enfant" ("The Same River Twice", 1993) et "Les hommes ne sont pas des héros" ("No Heroes: A Memoir of Coming Home", 2002), un roman de fiction: "Le Bon Frère" ("The Good Brother", 1997) et un second recueil de nouvelles: "Sortis du bois" ("Out of the Woods", 1999).
En 2018, il publie son deuxième roman, "Nuits Appalaches" ("Country Dark").

Principalement connu pour ses romans et ses recueils de nouvelles, il a également collaboré, de manière épisodique, comme scénariste à plusieurs séries télévisées américaines dont "True Blood" (2008), "Weeds" (2009) et "Treme"(2012).
En parallèle à sa carrière d'écrivain, Chris Offutt a été professeur dans plusieurs universités américaines et a collaboré avec différentes revues et journaux américains (New York Times, Men's Journal …).

En savoir plus : https://www.etonnants-voyageurs.com/OFFUTT-Chris.html

 

En savoir Plus :

Sur le roman



Dans l'univers du roman

les lieux


Sur la vie des appalachiens


Photos

Play-list

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.